[pʁɑ̃dʁ ɛ̃ dʁiŋk] (exp. SÉDUC.)
Au temps du suranné la langue de Shakespeare est encore peu maîtrisée par le commun des mortels, tout simplement parce qu’elle est peu enseignée (et aussi parce que le commun des mortels a du mal avec la perfide Albion depuis quelques siècles mais je m’égare). Elle est l’apanage des chanteurs, des hôtesses de l’air et des hommes d’affaires. C’est vous dire qu’elle est classe. En glisser un mot dans une phrase relève donc de la plus chic des attitudes, de celle qui fait le gentleman, le séducteur.Ainsi un homme à la mise soignée n’interpellera-t-il point la donzelle blonde-élégante en lui proposant « d’aller boire un verre » (et encore moins « d’aller vider une mousse ») mais bel et bien en lui offrant « d’aller prendre un drink ». Et paf, l’angliche est dans la place, la belle est sous le charme (comment pourrait-elle faire autrement ?). Envie de progresser dans la maîtrise du suranné et en anglais ? Let’s go, je vous explique.
Le drink est dans ce cas le signal du niveau attendu. Il va falloir envoyer de l’œillade qui papillonne, du rire cristallin, du lâcher de cheveux et du parler trainant juste ce qu’il faut, bref du minaudage façon BB. Lorsque l’on prend un drink toutes les boissons ne sont pas adaptées à la situation. Voici donc un éventail des solutions qui s’offrent à vous et des boissons à éviter.
Pour commencer on ne prend pas un drink avec un kir. Non, non, non et définitivement non. Gardez le kir pour la communion de votre neveu ou la pizzeria La Joconde. Sans ostentation et classique on ouvrira le bal par un Dry Martini, à ne pas confondre avec le Vodka Martini de James B. L’olive au fond du verre peut se manger mais attention tout de même à la faute de goût : elle se pique négligemment avec un cure-dent, et ne s’attrape pas avec les doigts. Je déconseille très nettement d’attaquer au Sex on the Beach qui donnera une tonalité trop hot pour un drink (si vous êtes une star du cinéma pour adultes oubliez ce conseil).
Très positionnant on trouve le Old Fashioned qui se sert avec un gros glaçon dans un verre à whisky qui lui a donné son nom. Chic comme il convient pour un drink. Si le barman vous sert votre drink avec une ombrelle ou une paille en forme de perroquet c’est que vous êtes au Papagayo ou chez Flunch à La Défense; dans les deux cas fuyez car ce n’est pas très drink tout ça. Le drink se prend au club ou au lounge bar car on se parle pendant que l’on sirote (sinon comment voulez-vous qu’elle minaude ?)¹.
Prendre un drink avec un Mojito est toléré, avec un Spritz est vraisemblablement déjà ringard mais vous pouvez tenter. Attention : pas de Champagne ! Je sais, la faute est courante. Dans ce cas on aura convié à « prendre une coupe » (même si le Champagne se boit en flûte) voire « une coupette » dans le cadre de la soirée de clôture de la Convention annuelle sur quelque sujet que ce soit.
On peut prendre un second drink lorsque le premier est épuisé. Dans ce cas on dira tout simplement que l’on « reprend un drink ». La formulation « une perfusion » ou « la p’tite sœur » demeure réservée aux soirées bière-foot.
Ce qui se passe ensuite vous appartient, n’abusez cependant ni de l’alcool ni de votre convive, on se conduit en gentleman quand on est suranné.
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