[kròké le marmo] (verb. intr. 1er grou.)
Les enfants sont formidables, comme nous le disait le bon Jacques Martin tous les dimanches dans son école des fans des années surannées.Enfin plus précisément « Les enfants sont formidables à la télévision parce que dans la vraie vie ils ne font rien qu’à nous casser les pieds et à nous empêcher de prendre l’apéritif au calme en bouffant toutes les cacahuètes avec leurs mains crados » était la citation dans toute son entièreté mais la politique nataliste soutenue par les divers gouvernements français ne l’a jamais autorisé à nous la faire entendre¹.
Nous allons tenter dans le calme d’envisager ici ces enfants sous une de leur dénomination des plus surannées, en l’occurence celle de marmot. Et ce marmot pour totalement bien l’étudier nous allons le croquer. Ne faites pas de moi un Gilles de Rais de pacotille, croquer le marmot n’est pas infanticide je vous rassure. Mes penchants sadiques tout comme les vôtres s’arrêtent à l’intention quand ce charmant marmot de vos amis vient de ruiner la tapis afghan à cinq mille boules avec des feutres indélébiles et que pour la quatrième fois il se baffre tous les petits fours à la truffe en les recrachant parce que « gnié pas bon » et que sa mère lui susurre un « ****-******** ce n’est pas très gentil ».
Or donc nous dévions quelque peu mais c’est pour la bonne cause que je vous fais languir car croquer le marmot c’est bien précisément attendre. Mais attendre avec le profond ennui désespérant qui va avec. Pas attendre deux minutes que la mémé devant ait terminé de raconter ses varices et diverses considérations météorologiques à la boulangerie le dimanche matin, non ça ce n’est que bien normal, mais attendre par exemple à La Poste dans la file des recommandés/colis internationaux/mandats pour l’outre-mer/Livret A, attendre le livreur de ce magasin de cuisines dernier cri qui passera, c’est sûr, entre 9 heures et 17 heures, attendre sans pouvoir rien faire d’autre qu’attendre tout en se demandant combien de temps il va falloir attendre, attendre telle la sœur d’Anne qui ne voit rien venir que le soleil qui poudroie et l’herbe qui verdoie².
Croquer le marmot pourrait bien nous venir du marteau qui dès le XVIᵉ siècle ornait les portes de bois des solides demeures. Souvent affligés d’une face criarde et hideuse celui qui s’en servait pour qu’on vienne lui ouvrir attendait patiemment que le maître de céans daigne lui faire honneur. Or le marteau était dit un marmot et le verbe croquer signifiait alors frapper. Il eut été plus simple d’utiliser « frapper du heurtoir » je vous l’accorde mais le lointain suranné est parfois compliqué.
Toujours est-il qu’aujourd’hui encore il peut nous arriver de croquer le marmot. Attendre depuis si longtemps un coup de téléphone, ou une lettre même si on n’écrit plus, attendre une parole, un geste, un signe, n’importe quoi qui pourrait apaiser ce maudit marmot qui s’agite et qui va bien finir par casser quelque chose s’il ne cesse pas sur l’heure. Certes l’expression est moins de mise puisqu’elle est surannée mais l’attente est toujours aussi longue que pour la sœur d’Anne mariée à ce mauvais mari cruel et sanguinaire.
Le vilain fut occis à l’épée et la belle épousa un homme qui la rendit heureuse³. Il y a donc de l’espoir à croquer le marmot.
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