[ʁɔneɔtipøz] (n. com. ÉDUC.)
C‘est à ce genre de détail que l’on reconnait les vrais surannés, ceux qui ont des années derrière eux. Si tu sais ce qu’est une ronéotypeuse tu l’es. Mieux encore, si tu es capable de te souvenir de l’odeur d’une feuille de papier sortant de la ronéo, alors tu es au top du suranné. Tout le monde est encore là ?
La ronéotypeuse pour le corps enseignant était un outil d’impression sur papier à des fins de transmission de connaissances à notre belle jeunesse assoiffée de savoir. Les naïfs qu’ils étaient.
En réalité la ronéotypeuse nous délivra nos premières bouffées alcoolisées dès huit heures du matin sans que nous ne sachions réellement ce dont il s’agissait. Juste une douce sensation. L’innocence de l’enfance a tous les droits. Mais enfin, rappelez-vous tout de même avec quelle délectation gourmande nous reniflions les feuilles de cours fraîchement sorties de la ronéotypeuse, de son vrai nom technique duplicateur à alcool !
Oui oui, le procédé d’impression reposait sur un transfert d’encre grâce à une solution à base d’alcool, vous avez bien lu. A six ans déjà l’éducation nationale nous entraînait sur la pente glissante de l’addiction (quand je vous dis que ce n’est pas de notre faute cette manie de prendre un verre). Cette solution était de l’alcool méthylique à 99 %, pouvant provoquer des troubles de la vision, des céphalées, vertiges et autres nausées. Hautement toxique elle fut remplacée des années plus tard par de l’alcool éthylique dénaturé ou par du propylène glycol. Mais c’était trop tard, on avait déjà foiré nos études à cause d’elle. Tout est à cause de la ronéotypeuse. Le scandale de la ronéo est caché par les médias complices mais il est au moins aussi important que celui de l’amiante et de la vache folle réunis. La ronéo nous a flingué une génération brillante.
Combien d’Einstein n’auront pas vu le jour s’arrêtant à la table de multiplication par 5 pour cause de neurones affaiblis par l’alcool ? Combien de prix Goncourt auront échoué dès la dictée puisque shootés à dix heures du matin ? Moi-même, ne dois-je pas ma vie de guingois à cette machine à dupliquer ? Et toi François, et toi Laurence, et toi Marion, et toi Gégé…et toi Bruno, et toi Evelyne ? 🎶🎶On s’était dit rendez-vous dans dix ans… Mais je m’égare une fois de plus, des restes de vapeurs d’alcool sans aucun doute.
Cela dit si tu n’as pas tout oublié, si la ronéotypeuse te revient maintenant un peu en mémoire c’est que tu n’es pas foutu. Avec un peu de chances tu te remémores même les vers de ce poème ou bien le Petit Prince ! Si tu te souviens, alors tu es sauvé.
Tu n’es encore pour moi qu’un petit garçon tout semblable à cent mille petits garçons. Et je n’ai pas besoin de toi. Et tu n’as pas besoin de moi non plus. Je ne suis pour toi qu’un renard semblable à cent mille renards. Mais, si tu m’apprivoises, nous aurons besoin l’un de l’autre. Tu seras pour moi unique au monde. Je serai pour toi unique au monde…
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