[a la kul] (loc. CART.)
Parmi les irrémédiables dégâts que l’angliche a fait subir à la langue surannée se trouve celui de la disparition d’une expression marquant l’astuce et l’intelligence de situation, l’analyse rapide et la capacité à manier les ficelles du métier.
À la coule qui signifie tout ça, a en effet été tuée par sa sonorité trop similaire à « à la cool », en franglais dans le texte.
Présentée en grande pompe et grandes ondes au peuple français par Max Meynier et son « cool Raoul » iconique, à la cool va piétiner les plates-bandes d’à la coule en moins de temps qu’il ne faut à Steve McQueen, roi du cool, pour dégainer sa Winchester calibre 44/40 modèle 1892 à crosse et canon sciés dans un épisode d’Au nom de la loi¹.
Malgré une bonne centaine d’années d’existence, à la coule ne va pas résister.
On dit en effet qu’on est à la coule depuis le milieu du XIXᵉ et le succès d’une sorte de belote, jeu de carte dans lequel connaître la couleur de l’atout autour duquel se joue la manche est primordial. L’informé, le malin, le joueur expérimenté est à la coule : il a repéré la couleur, la coul’ comme on dit quand on est cool.
Du pipi de chat à côté d’un déhanchement et d’un demi-sourire narquois de Josh Randall arrachant une affiche Wanted Dead or Alive ou défouraillant avec sa Mare’s Leg et envoyant les méchants ad patres. De la gnognotte face à un cool Raoul de Max adressé à un routier sympa.
Submergée par l’importation massive de la cool attitude made in USA, à la coule ne pourra porter son sens initié plus longtemps. Même au Balto où l’on tapait le carton depuis des dizaines d’années en annonçant être à la coule, on la met en veilleuse et on se la joue cool, accoudé au zinc tout en buvant un Coca-Cola®.
À la coule coule.
La modernité impose son style : ce sera désormais hype et cool.
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