[a la ɡòm] (inv. NUL.)
Le registre dépréciatif suranné a posé sur les marches les plus élevées de son échelle une expression qui dissimule bien sous son aspect simplet le plus profond mépris.
À la gomme passe en effet pour mignonne pour qui ne connaît pas son origine réelle et la croit familière de mystère et boule de gomme, gentille comme le titre d’un épisode du Club des Cinq alors qu’elle n’est que camouflet.
Née aux alentours de 1840, à la gomme charrie dans son panier ce qui fait le caractère du gommeux : fatuité, médiocrité, inutilité, vanité¹.
Ce qui est à la gomme est du domaine des cocodès
Ce qui est à la gomme est du domaine des cocodès, descendants des gandins, des gants jaunes, des fashionables, des incroyables, des merveilleux, des roués, des menins, des beaux fils, des mignons et de tout ceux qui surent faire apprécier en cour à chaque époque leur vacuité abyssale et maline, flatteuse pour le puissant qui s’y compare un instant.
Dernier de cette lignée du creux, le gommeux va donc laisser une trace dans le langage (c’est déjà ça) avec son à la gomme qui signifie le manque de valeur et l’inutile. Une histoire à la gomme endort son auditoire, une chanson d’amour à la gomme est plus mièvre qu’un poème pré-pubère, un mariage à la gomme n’est fait que de raison, une promesse à la gomme s’efface dans la seconde.
Happés dans le vide qu’ils imaginaient combler, les gommeux vont cependant peu à peu disparaître, laissant la place à de nouveaux béjaunes tout autant à la gomme qu’eux mais non affublés des affres de l’expression puisque celle-ci suivra ses inspirateurs dans l’oubli.
Un temps envisagé en synonyme, à la noix décevra, de même qu’à la mords-moi-le-nœud ne confirmera pas les espoirs mis en elle, et à la con sera jugée trop vulgaire.
Une aubaine pour les histoires, chansons et promesses en tous genres qui n’auront plus à souffrir de cette turpitude qui leur collait aux basques à chaque prétention un petit peu trop visible.
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