[a tirlariɡo] (loc. PAROXY.)
Si la France est le pays du bon vin il ne faut alors point s’étonner que nombre de nos expressions désormais surannées aient un rapport quelconque avec la Dive bouteille.
Cela dit nos ancêtres qui inventèrent cette langue qu’on ne parle plus ont dû un peu forcer sur la boutanche ou plutôt boire à tire-larigot comme on disait alors parce que des fois elle est complexe.
À tire-larigot nous vient donc du goulot, tirer s’entendant faire couler un vin de sa bouteille ou de son fût dans ce XVIᵉ siècle de la Renaissance où il naquit. Simple. Larigot est beaucoup plus confus.
Il est commun (limite pédant) de dire que larigot est un jeu d’orgue appartenant à la famille des mutations, mais vous le saviez certainement. Explication un peu facile car je ne vois vraiment pas comment un tuyau de 1,33 pied de hauteur, même donnant l’octave supérieure du nasard (sixième harmonique de la fondamentale), peut atterrir dans une expression nous proposant une certaine idée du paroxysme. Oui, je ne vous l’ai pas dit mais à tire-larigot c’est en grande quantité. Mais ça aussi vous le saviez, après tout vous êtes surannés.
Il nous faut donc supputer et intriguer pour découvrir ce larigot.
Nous l’avons vu ci-dessus, la France est un pays de vin; mais c’est aussi un pays de terroirs et en remuant la terre on trouve bien souvent quelques explications. Rendons-nous prestement en Aveyron, Cantal, Lozère, pour y déguster l’aligot délicieux qui aurait bien pu donner son nom à larigot, le « r » se roulant aisément au pays des Bougnats. Une chopine de pinard et un aligot-saucisse pour l’histoire de tire-larigot ça se tient, le tout à consommer vite-fait parce que chez ces gens là on ne chôme pas, ça se tient tout autant.
Des savants nous racontent que larigot est un vieux mot qui signifie gosier et que boire à tire-larigot serait ainsi logique… Je suis dubitatif. Ces braves gens oublient que l’on fait bien des choses à tire-larigot. On joue, on chante, on danse à tire-larigot. On m’a dit que certains tirelipimpon sur le chihuahua à tire-larigot, c’est vous dire jusqu’où ça va.
Et l’arigot comme une petite flûte rustique du XVᵉ siècle je l’oublie rapidement car ici on ne joue pas de pipeau, on fait plutôt dans la rigueur tu le sais bien ami lecteur.
À tire-larigot ne nous dira donc abondance que tant que nous ne voudrons pas totalement l’oublier ce qui serait une bien cruelle erreur, vous voudrez en convenir, dans une époque où tout doit être compté et économisé. Le jour où on l’aura perdu au fond de la bibliothèque des surannés, on ne boira plus qu’avec modération, on ne rira plus qu’à gorge réservée, on ne roulera plus qu’à tombereau fermé et on se fera une raison pour un gentil mari mais surtout sans passion.
J’aurai par précaution tiré ma révérence.
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