[ɑ̃tɛn dø] (n. cial. TV.)
J‘admets que j’ai cédé à la tentation du titre racoleur.
Car vous le saviez bien avant même d’entrer, Antenne 2 c’est ringard mais nullement suranné. Puissiez-vous me pardonner.
Il me faut dès lors m’expliquer un peu plus. Le suranné dont il s’agit ici est en fait le générique de fermeture des programmes d’Antenne 2, tel que l’avait créé Folon. Une merveille de poésie.
Mais je vois que nous sommes en train d’en perdre certains. Les moins de tente ans en fait. Là encore chers amis djeuns’, je vous dois des explications.
Il était une fois, en des temps surannés, trois chaînes de télévision françaises.
Sur la une TF1, sur la 2 Antenne 2 et sur la 3 FR3. Rien au-delà, rien en deçà (non, le concept de 0 et de multi-écrans n’existait pas). En ce temps là, les programmes télévisuels débutaient vers 10 heures du matin avec des émissions éducatives que les écoles dotées d’un poste de télévision (élément onéreux à l’époque) pouvaient faire regarder à leurs élèves. Et lesdits programmes prenaient fin aux alentours de minuit, laissant place à ce que l’on dénommait alors le brouillard¹.
Cependant, avant la tombée du brouillard en question, des hommes oiseaux majestueux quittaient la planète Antenne 2 sur une musique d’une tristesse poignante qui nous laissait imaginer que le soleil ne se lèverait peut-être pas le lendemain². C’était le fameux générique de fermeture des programmes créé par Jean-Michel Folon. Un must.
En tant qu’expert, je peux certifier sur l’honneur que ces quatre-vingt secondes d’animation ont toujours été surannées. Dès le premier jour.
Leur propos, leur graphisme, leurs couleurs, leur instant de diffusion, tout a concouru à les surranéiser instantanément. Je les adore. Elles m’évoquent immanquablement mon grand-père paternel, un colosse aux bras aussi longs que ceux des bonshommes de Folon et que je me plais à voir lui aussi avec un chapeau et un manteau d’hiver. Un souvenir.
Grâce à un tout petit moment de la télévision, Antenne 2 a pu acquérir un peu de suranné, et croyez-moi ce n’était pas gagné d’avance.
Ami moderne né sous les Internet je te plains. D’un clic d’un seul tu peux immédiatement accéder à tout. À Folon bien entendu et au pire de la création aussi. Tu n’as pas à attendre très tard pour voir les bonshommes s’envoler.
Je te plains. Tu n’as pas à ruser pour veiller et voir leurs longs bras s’agiter.
Je te plains car si tu veux réentendre leur musique tu cliques sur « Play again ».
Je te plains car le suranné c’est aussi le désir, celui qui se cultive dans l’attente et qui crève d’impatience. Bon, je fais un petit tour par ton époque mais c’est pour la bonne cause : je vais me regarder les bonshommes de Folon.
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