[avwar lé bôbô ki kòl o papjé] (loc. verb. HARIB.)
Si les premiers bonbons datent du XIIᵉ siècle et du retour des Croisés avec la canne à sucre à défaut de Graal, il faudra attendre le XIXᵉ siècle et la mise au point de l’extraction industrielle du sucre de betterave en 1811 par Benjamin Delessert et Jean-Baptiste Quéruel pour lancer véritablement l’histoire de la friandise sucrée.
En hommage purement symbolique, il sera attribué à Napoléon 1er, grand promoteur des recherches betteravières pour faire la nique au blocus imposé par la perfide Albion qui coulait les bateaux venant des Antilles, l’expression avoir les bonbons qui collent au papier. Certains historiens de l’art osent même développer la thèse que l’auguste geste de la main dans le gilet de l’empereur n’est qu’une vision éthérée d’une main dans le falzar pour remettre en place les bonbons qui collent au papier, mais faute de validation académique de telles assertions nous ne saurions en faire une vérité. Cela dit, c’est plausible : l’artiste ne pouvait décemment léguer à la postérité un Bonaparte se malaxant les roubignoles !
Car avoir les bonbons qui collent au papier est une sensation des plus fâcheuses, et que celui qui n’a jamais eu à se battre avec un caramel fondu nous le jette au visage.
Moiteur du milieu concerné aidant, les bonbons ont une tendance naturelle à la sudation qui peut être renforcée par des conditions climatologiques exacerbées, et par le coton de qualité moyenne d’un slip kangourou de pacotille. Pour ne pas avoir les bonbons qui collent au papier on commencera donc par se munir de sous-vêtements de qualité, ce qui n’était pas évident sous le 1er Empire mais est nettement plus accessible de nos jours.
Avoir les bonbons qui collent au papier est une expression de genre, vous l’aurez bien noté, puisqu’elle ne peut être utilisée par une femme à la première personne¹. Elle fait partie de ces incongruités grammaticales que la langue surannée qui se tamponnait bien le coquillard des questions d’égalité des sexes devant le participe passé a imposées, et nul n’y pourra rien. Aussi en déconseillons-nous très fortement l’usage au féminin dans une conversation, sous peine d’initier une forme de malaise que la chaleur ambiante ne pourra que renforcer.
Le déclin progressif du caramel mou et de la bêtise de Cambrai au profit de confiseries modernes (et tout autant délicieuses) sous forme de fraises Tagada, réglisses en rouleau, chamallows, vendus en paquets sans papier a envoyé avoir les bonbons qui collent au papier en surannéité. De même, le geste de la main dans le gilet ou dans la culotte du zouave est devenu désuet voire inconvenant en société.
Stoïque, le moderne supportera désormais sans maugréer cette sensation désobligeante pour laquelle il n’a donc plus les mots.