[avwar la kòlòkêt â brêɡ] (loc. céphal. EXCUS.)
Classée parmi les plus vieilles excuses de l’humanité pour ne pas accomplir quelque tâche qui soit selon l’Organisation Mondiale de la Santé, la céphalée a pu bénéficier d’expressions pas piquées des hannetons avant de finir en un simple et moderne « j’ai mal à la tête ».En des temps où l’évitement n’omet pas de faire dans la formule châtiée c’est avoir la coloquinte en bringues qui s’emploie donc chez le sujet touché.
Cucurbita pepo ou Cucurbita argyrosperma, mais courge quoi qu’il en soit, la coloquinte est assez tôt devenue synonyme de tête, vraisemblablement dès la fin du VIIIe siècle quand elle apparaît comme plante à cultiver recommandée par Charlemagne dans le capitulaire de Villis¹. Ses apparences multiples du rond à l’oblong, ses couleurs variées, ses bubons parfois qui ne sont pas sans rappeler l’adolescence ou l’herpès labial, en font aisément une galerie de portraits plus ou moins flatteurs de n’importe quel groupe humain.
Il suffit dès lors au langage de lui adjoindre la plus commune des formules du désordre et de l’éparpillement façon puzzle pour créer une expression à succès : avoir la coloquinte en bringues.
Notons qu’une thèse un peu trop belle pour être crédible attribue à la bacchanale bien arrosée – ou bringue – l’origine de l’expression, arguant de l’état post goguette, dit aussi gueule de bois, pour justifier ses dires. L’examen du -s final d’avoir la coloquinte en bringues écarte cependant bien vite cette explication soûlocrate.
Si l’on peut avoir la coloquinte en bringues après une tournée des grands-ducs d’anthologie, les bringues en question n’en restent pas moins ces nombreux petits morceaux éparses dans lesquels semble alors se trouver les souvenirs plus ou moins brumeux d’après la cinquième tournée de rogomme.
Malgré ce débat d’experts, avoir la coloquinte en bringues qui est surtout d’usage oral rencontrera une audience conséquente tant sont fréquentes les occasions de se trouver une excuse pour ne pas faire son (ses) devoir(s).
La Classification internationale des céphalées² publiée en 1988 par la très sérieuse Société Internationale des Céphalées (International Headache Society) dans son journal Cephalalgia viendra stopper brusquement l’utilisation d’avoir la coloquinte en bringues.Rendue désuète par une administration savante lui préférant céphalée de tension, céphalée trigémino-autonomique, neuropathie crânienne douloureuse, céphalée attribuée à un désordre de l’homéostasie ou céphalée trigémino-autonomique, la coloquinte en bringues rejoindra les maux surannés des vieux dictionnaires de médecine et leurs remèdes de grands-mères (onguents, saignées, ventouses et autres décoctions magiques pour lendemains ouatés).
Le regimbement y perdra de sa gouaille sans gagner en prestance : en modernité on refuse désormais parce qu’on « a poney ».