[avwar le taf o fiNòtô] (loc. fray. TROUIL.)
Alors qu’elle s’adresse avant tout au cerveau et à ses parties les plus primitives, la peur cherche le plus souvent son expression dans une utilisation de zones moins nobles du corps humain.Avoir les foies, serrer les fesses, avoir les tripes nouées, avoir les fesses qui font bravo se partagent une bonne partie des angoisses surannées, laissant ce qu’il faut de place aux esthètes qui useront quant à eux d’avoir le taf au fignoton.
L’idée d’une pétoche maximale entraînant d’éventuelles complications intestinales est là aussi sous-jacente, avec cependant un degré de subtilité supérieur à chier dans son froc et autres expressions ne laissant pas de place à l’imagination.
Avoir le taf au fignoton est ce qui se fait de mieux pour décrire le soudain saisissement, la malepeur, le branle-bas qui surgit face à l’épouvantable.
Quand on fait patatrot sur le grand trimard on a le taf au fignoton
Taf ramène sa fraise et ses trois lettres au XVIe siècle, tandis que règnent des visions d’ici-bas et de l’au-delà portées par Jérôme Bosch et ses comparses en production d’images (cf. fig. A), bonnes à mettre le trouillomètre à zéro à n’importe quel pékin. La peur de tout et de n’importe quoi pouvant entraîner la mort est alors un outil essentiel pour dominer les foules : quand on fait patatrot sur le grand trimard on a le taf au fignoton et la tête dans le seau¹.
Jusqu’à un XIXe où il flamboie dans la littérature la plus noble (Balzac, Zola) taf s’accommode de fignoton, un tantinet moins vulgaire que cul ou derche, pour faire part de ce degré d’affolement de l’instinct de survie.
Même si elle est utilisée avec parcimonie par une aristocratie de la langue surannée, avoir le taf au fignoton va ainsi durer plusieurs centaines d’années, caractérisant tour à tour la peur du loup ou de la bête du Gévaudan, la crainte d’un retour de la grande peste noire, l’angoisse d’attraper la grippe espagnole voire les affres de tomber au bachot sur un sujet non révisé.
Le glissement sémantique inexpliqué faisant passer le taf pour un travail² et la taffe pour une bouffée de cibiche aura raison d’avoir le taf au fignoton comme expression de la peur.Formule incompréhensible pour le moderne qui n’a d’ailleurs plus peur de rien³, elle peut même faire sourire si elle est prononcée tant son fignoton s’avère mignon. La Grande Peur n’est pas d’actualité.
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