[avwaʁ yn livʁɛzɔ̃ də bwa dəvɑ̃ sa pɔʁt] (loc. verb. STER.)
SYN. y avoir du monde au balcon, avoir des oranges sur la cheminée.
Une fois abandonnée la chaleur animale des premières années surannées (de -2 400 000 à 1327 environ), c’est vers la cheminée que se sont tournés les hommes lors des hivers rigoureux et des soirées sans télé.
Un mode de chauffage qui nécessite de passer par la corvée de bois ou par la livraison de bois devant sa porte pour les plus réticents à se saisir du manche de la cognée et à le faire reluire.
Aucune recherche sérieuse n’a pu aboutir à une explication rationnelle pour expliquer la transformation de cet acte commercial et ce service rendu au plus près du client en descriptif d’atouts féminins conséquents, car c’est bien là le sens réel de l’arrivage à domicile des trois stères commandés. Quand il y a une livraison de bois devant sa porte, il y aussi du monde au balcon.
Avoir une livraison de bois devant sa porte est l’un des plus grands mystères de la langue surannée.
Les conditions générales de vente les plus complexes ont été lues jusqu’au dernier des petits caractères (ceux qui font que quoi qu’il en soit le client l’aura dans l’os, mais ceci est une autre histoire), des dizaines de bûcherons ont été entendus, des centaines de livreurs interrogés, des clientes sondées : avoir une livraison de bois devant sa porte est d’origine inconnue. Rien ne parvient à l’expliquer.
Certes celle qui a une livraison de bois devant sa porte ne laisse généralement pas de bois le grand abatteur de quilles (en bois), mais se contenter de la présence du matériau naturel dans plusieurs expressions à caractère licencieux pour en faire un argument savant serait un grave fourvoiement. Et en ces lignes d’un Dictionnaire raisonné des mots surannés et expressions désuètes connu pour sa rigueur, pas question de se fourvoyer.
Nous préférons admettre haut et fort que nous ne sommes pas en mesure de démontrer pourquoi avoir une livraison de bois devant sa porte signifie que la maîtresse de maison a de la conversation.
La mise au point de la machine à vapeur par James Watt va donner le ton de la révolution industrielle comme premier acte de la modernité. Préférant le charbon puis le pétrole et l’atome pour produire la chaleur des foyers, celle-ci va envoyer en surannéité avoir une livraison de bois devant sa porte.
L’ultime plaidoyer pour le matériau traditionnel prendra la forme d’une chanson et les formes de son interprète : en 1987, Sabrina Salerno s’époumone avec brio¹ sur Boys (Summertime Love) dans la piscine du Florida Hôtel (Venise). En France et en Suisse, pays où l’on apprécie avoir une livraison de bois devant sa porte, le 45T cartonne et se classe numéro 1.
Mais c’est un baroud d’honneur.
L’expression disparaît peu après. Le feu dans la cheminée est désormais suranné, le chauffage central a gagné.
🎶Boys boys boys, I’m looking for a good time
Boys boys boys, get ready for my love
Boys boys boys, I’m looking for the good times
Boys boys boys, I’m ready for your love🎶