[blâ kas] (n. comp. TCHIN)
Le chanoine Félix Kir, résistant héroïque, maire de Dijon, bon vivant réputé et député se baladant toujours avec une bouteille de vin blanc et de la liqueur de cassis, jamais en retard d’un bon mot¹, fut aussi à son insu le pousseur en surannéité du blanc cass.
En cédant son nom à la maison Lejay-Lagoute (créateur de la liqueur de cassis en 1841), il créa le Kir cassis qui hante encore aujourd’hui les cartes tachées de gras des pizzerias de quartier² et célèbre le départ à la retraite du moindre responsable de photocopieuse du troisième étage².
Boisson préférée du moderne qui y perçoit les nuances subtiles du Bourgogne aligoté impératif à sa préparation, le Kir cassis est aussi à ses yeux ne regardant que l’avenir, nettement plus en phase avec l’époque que le plébéien blanc cass qu’on se jette derrière la cravate accoudé au comptoir.
C’est vrai qu’il est parfois un peu râpeux le blanc cass, et que s’il casse quelque chose c’est surtout la voix, mais c’est aussi la boisson dans laquelle papy me laisse tremper les lèvres quand je l’accompagne « chercher le pain et le journal » comme il dit à mamie (en me faisant un clin d’œil), mais ceci est une autre histoire. Peu en phase avec le snobisme nominatif et ronflant du Kir cassis, le blanc cass s’est donc retrouvé avec les oubliés du zinc : Viandox, Picon bière, fine, Dubonnet, dame verte, etc.
Sur les étagères poussiéreuses de la réserve du bistrot il se gausse le blanc cass ! Le Kir-cocktail-d’accueil-offert-avec-chips-à-volonté se décline désormais en framboise, fruits de la passion, royal (!), fraise, et mille substances odorifères et irresponsables.
Le chanoine doit en perdre la foi. S’il avait su que son nom serait un jour venu entaché d’une telle infamie, pour sûr il en serait resté au blanc cass pris à la buvette de l’Assemblée.