[avwaʁ œ̃ kafaʁ dɑ̃ lø Choubersky] (INVENT. CON.)
Charles Choubersky n’était pas la moitié d’un con. Le zèbre frisait même le génie, passant son temps à inventer (on ne disait pas encore innover, la Nation n’ayant alors rien d’une start-up mais ceci est une autre histoire) avec une obsession toute particulière pour le mouvement perpétuel.
Né dans le lointain empire de Russie (Российская империя), ingénieur ingénieux de son état, il aurait pu sa vie entière bâtir des ponts pour le chemin de fer Rostov-sur le-Don/Vladikavkaz mais le bougre avait d’autres ambitions dans le ciboulot.
C’est évidemment à Paris, ville du Progrès, qu’il s’installe et crée entre autres les patins-bicyclettes, l’armoire-lavabo ou le poêle Choubersky pour se chauffer la couenne.
Connu et reconnu pour son cerveau fécond, c’est bien naturellement que ses contemporains lui rendent hommage en désignant son opposé, le couillon, comme ayant un cafard dans le Choubersky. On entrevoit aisément l’impossibilité pour l’abruti de forger un poêle efficace ou de fabriquer des patins à roulettes si une blatte se promène dans son cerveau.
Mais il a un cafard dans le Choubersky ce type !
Les nombreux clients défilant dans son magasin (19 rue de Choiseul, Paris, face au Crédit Lyonnais) feront à la fois son succès commercial et celui de l’expression pointant le crétin. Avoir un cafard dans le Choubersky grandira au même rythme que les usines Choubersky sises rue Félicien David. En cette fin du XIXe siècle, chaque mollasson de la jugeote est diagnostiqué comme ayant un cafard dans le Choubersky par l’observateur non issu du corps médical.
« Mais il a un cafard dans le Choubersky ce type ! » entend-on sur les boulevards quand déboule un gâteux ou lorsqu’un indélicat collignon manœuvre sans crier gare. L’inconséquent saisit vite le camouflet s’il lui reste deux neurones en fonction.
Sans doute pressentant que la connerie ne renoncerait pas malgré le talent de la langue à lui rabattre le caquet, Charles Choubersky se loge une balle de revolver en plein cœur à l’âge de cinquante-sept ans. Avoir un cafard dans le Choubersky lui survivra un temps puis se verra submergée par tant d’alerquinade qu’elle s’inclinera, rongée par le cancrelat.