Catégorie : Langues

Étouffer un perroquet [étufé ê péròkè]

Fig. A. Cocoooooo, cooooco.

[étufé ê péròkè] (loc. verb. SPA.)

Rassurons les amis des animaux : aucun cacatoés rosabin, aucun ara, aucun jaco, ni même aucun bavard impénitent n’a été blessé pour la mise au point de cette définition. Le langage suranné quand il fait dans l’image violente, ne joint jamais le geste à la parole.

Avoir les bonbons qui collent au papier [avwar lé bôbô ki kòl o papjé]

Fig. A. Napoléon Bonaparte et son fameux geste des bonbons qui collent au papier. Musée d’Ajaccio.

[avwar lé bôbô ki kòl o papjé] (loc. verb. HARIB.)

Si les premiers bonbons datent du XIIᵉ siècle et du retour des Croisés avec la canne à sucre à défaut de Graal, il faudra attendre le XIXᵉ siècle et la mise au point de l’extraction industrielle du sucre de betterave en 1811 par Benjamin Delessert et Jean-Baptiste Quéruel pour lancer véritablement l’histoire de la friandise sucrée.

Écorcher le renard [ékòrSé le renar]

Écorcher le renard

Fig. A. Un renard parmi cent mille renards.

[ékòrSé le renar] (loc. verb. BEUÂÂÂ.)

La langue surannée est parfois sombre et cruelle. Somme toute bien consciente de son côté obscur, c’est aussi pour cela qu’elle se terre au fond des livres anciens et se tient à distance du phrasé des modernes. Cette définition est donc à la fois sale et méchante, vous voici prévenus.

Rhabiller le gamin [rabijé le ɡamê]

Fig. A. Un gamin à rhabiller. Archives du Balto.

[rabijé le ɡamê] (loc. verb. BALTO.)
Le suranné aime les bistrots, les troquets, les bouges, les estaminets. Il s’y sent comme un poisson dans l’eau bien que l’eau ne soit pas la boisson la plus consommée au comptoir, mais ceci est une toute autre histoire (cela dit, sachez apprécier et consommer avec modération).

Ne pas faire rire les mouettes [ne pa fèr rir lé mwèt]

Ne pas faire rire les mouettes

Fig. A. Mouette à l’œil rieur.

[ne pa fèr rir lé mwèt] (loc. verb. MDR.)
Plutôt sociable et sympathique, la chroicocephalus ridibundus passe le plus clair de son temps à becqueter et à se fendre la poire. Elle est ainsi la mouette rieuse, toujours prête à faire le gugusse histoire de se gondoler avec ses congénères. Et quand elle se bidonne pour un guano bien balancé sur un promeneur en ciré jaune, ça en fait du barouf.

Se beurrer la biscotte [se bëré la biskòt]

Fig. A. Homme aimant se beurrer la biscotte.

[se bëré la biskòt] (loc. verb. PET. DÉJ.)

La langue surannée ne fait jamais dans l’à-peu-près. Elle est précise, chirurgicale, et la moindre de ses nuances fait bifurquer un sens. Ciselée comme une œuvre, elle fait d’une différence subtile un monde à explorer et c’est dans celui doux ou salé du beurre que nous allons nous plonger.

Prendre le bouillon de onze heures [prâdre le bujô de ôz ër]

Prendre le bouillon de onze heures

Fig. A. Socrate prenant le bouillon de onze heures.

[prâdre le bujô de ôz ër] (gr. verb. ARSEN.)

Incomplète, mâtinée, une expression surannée devient moderne et perd de sa force évocatrice. Refusant le pis aller d’une langue fatiguée, voici que nous nous retrouvons à défendre les empoisonneurs qui firent les beaux jours de la faucheuse au XVIIᵉ.

On aura tout vu en ces lignes…

Faire des queues aux zéros [fèr dé kö o zéro]

Fig. A. Prix pas cher faisant des queues aux zéros. Musée de la grande distribution.

[fèr dé kö o zéro] (gr. verb. COMMERC.)

L‘inflation est la perte du pouvoir d’achat de la monnaie qui se traduit par une augmentation générale et durable des prix. Elle doit être distinguée de l’augmentation du coût de la vie.

Enfin ça c’est l’INSEE qui essaye de nous le dire simplement, mais nous on sait bien que le seul truc qui compte c’est que les prix aient augmenté, pas que ce soit la faute à pas de chance ou au sens de l’histoire.

Pleuvoir comme à Gravelotte [plövwar kòm a ɡravlòt]

Fig. A. 16-18 août 1870. Bataille de Gravelotte.

[plövwar kòm a ɡravlòt] (gr. verb. METEO.)

Avec ses 836 habitants recensés en 2014 par les services de l’Etat dûment mandatés pour ce faire, la petite commune mosellane de Gravelotte possède toutes les apparences du village français anonyme et tranquille entendant bien rester et l’un et l’autre.

Manger une soupe à l’herbe [mâZé yn sup a lèrb]

Fig. A. Recette de la soupe à l’herbe. Illustration Rita Renoir.

[mâZé yn sup a lèrb] (gr. verb. BLE.)

Principe fondamental des années surannées, « mange ta soupe pour grandir » assomma de son impériosité sentencieuse plusieurs générations peu portées sur le bouillon de poule et la carotte mixée. Il est donc fort probable que ce traumatisme d’une enfance bafouée contribua à faire entrer en surannéité une expression au demeurant délicieuse.