[ʃaskuzɛ̃] (n. m. VIN.)
Le gros rouge qui tâche, la piquette du père Lardet, le pinard à Jojo, le picrate qui nettoie, voici le chasse-cousin.
Autant dire que le cousin en question devait être un sacré client pour ne mériter que l’obole d’un coup de rouge plus propre au dernier des vinaigres qu’à trinquer à la vie à la mort. Parce que le chasse-cousin pique et refoule, parce qu’il est encore plus efficace qu’un bon vieux coup de fusil, il boutera le malvenu hors d’ici et fera passer son chemin au convive qui s’improvise trop souvent. D’où son appellation, vous l’aviez bien compris.
L’identification du chasse-cousin ne demande guère de connaissances œunologiques : sa prise en bouche renseigne immédiatement le plus réticent à l’art dégustatif. Acide comme un fruit encore vert, il hérisse les muqueuses dans l’instant. Son caractère âpre et astringent est sa qualité première : il fera fuir l’importun. Si toutefois il vous était servi, apprenez donc que vous faites partie de la catégorie.
On notera plusieurs déclinaisons modernes du chasse-cousin : le Mon-Chéri, vulgaire enrobage de chocolat noir fourré d’une cerise confite et de liqueur du même fruit, le cake thon-olives-roquefort-camembert, ou encore le mousseux méthode champenoise.
Une question bien légitime se pose : doit-on posséder chez soi un chasse-cousin (que j’aurais pour ma part appelé chasse-belle-mère si j’en crois la légende sur le caractère du personnage) ? La chose est-elle légale, la chose est-elle morale ? Les plus vicieux auront déjà réglé la question depuis longtemps en transvasant une piquette dans une bouteille de prestige, les plus économes recycleront le cadeau professionnel d’un fournisseur depuis éconduit, et les moins prévoyants fabriqueront à la hâte quelque immonde spécialité culinaire régionale dont ils auront trouvé la formule sur un site Internet collaboratif empli de blogueuses fières de partager leurs élucubrations créatives de mauvais goût¹.
Oui, la convivialité et l’hospitalité ont aussi une face obscure.
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