[sirkyl, virɡyl, u Ze tapòstròf] (gr. excl. OUST.)
Le typographe, savant metteur en plomb de la langue écrite afin qu’elle parvienne aux générations qui suivront, est aussi un sacré inventeur en matière d’expression.
À force de mettre en forme celles des publicistes, cet autre homme de lettres méritait un hommage : circule, virgule, ou je t’apostrophe l’est.
Il ne viendrait qu’à un esprit patraque l’idée de contester que circule, virgule, ou je t’apostrophe puisse être issu d’un autre caractère que de celui bien trempé du prote de la composition qui, justement, manie à longueur de journées les signes de ponctuation, les cadratins, les chasses et diacritiques.
Circule, virgule, ou je t’apostrophe raconte l’histoire d’une petite respiration – la virgule – qui pourrait bien devenir la dernière et rejoindre les cieux en devenant apostrophe (sise quelques millimètres plus haut), faute d’un débarras du plancher dans les plus brefs délais.
Circule, virgule, ou je t’apostrophe est en quelque sorte l’ultime coup de semonce avant celui de Jarnac.
Il aurait été étonnant qu’un homme aussi pointilleux sur la forme que l’est le typographe, se contente d’un sentencieux ôte-toi de mon soleil ou de son renversé marche à l’ombre, bien trop faciles d’usage pour envoyer valser l’importun avec pertes et fracas. Ce pourquoi il créa circule, virgule, ou je t’apostrophe. Copurchic et mâtin !
Trop peu nombreux sont les chercheurs s’étant penchés sur l’expression pour qu’on apprenne si elle naquit sous les casses de Johannes Gutenberg ou celles de Bodoni, mais il est en revanche certain qu’elle vécut tranquillement jusqu’en 1995, année moderne durant laquelle Vincent Connare¹ commit la Comic Sans, typographie qui rencontra avec délectation les velléités créatives de tout responsable-administratif-en-charge-de-l’affichage-réglementaire-à-la-cafétéria² doté du tristement célèbre Windows 95.
La possibilité soudaine de toucher au Graal de l’art de l’imprimerie fit voler en éclat des siècles de rigueur et tua rapidement circule, virgule, ou je t’apostrophe puisqu’elle rendit surannée toute règle sur les signes en question.
Bouge de là fit son apparition, chapeauté par un plus général vas-y (enjoignant d’y aller sans pour autant préciser où); le suranné va voir là-bas si j’y suis tenta de revenir : en vain. Circule, virgule, ou je t’apostrophe rejoignit le cortège des expressions tout autant désuètes que les métiers dont elles sont issues.
Tout ça à cause de la Comic Sans…