[klabodœʁ] (n. m. RAG.)
Il claque du bec ce clabaudeur. Pour un peu on l’entendrait presque aboyer rien qu’en lisant son nom, ce qui est, rappelons-le une fois de plus, une qualité intrinsèque du suranné. Je réitère : le suranné donne le ton de ce qu’il est avec ses syllabes. En appliquant cette règle fameuse vous aurez dès lors défini que le clabaudeur est un hâbleur claquant du bec bien haut et fort et portant beau. Une synthèse de Maître Renard et du Corbeau en quelque sorte.
Le clabaudeur est fort en gueule, c’est là sa raison d’être. Il la ramène aussi souvent qu’il peut et le potin est son pain quotidien. Peu scrupuleux, le clabaudeur cancane à qui mieux-mieux, jamais avare d’une médisance ou d’un ragot. Le bougre a en plus la langue bien pendue, c’est pour ça qu’on la dit parfois « de vipère » voire « de pute ». Cela tant qu’il est homme bien entendu, car tout suranné que vous êtes, vous vous souvenez bien qu’il est aussi un chien.
Lorsqu’il rejoint le monde canin, le clabaudeur devient un brave toutou devant lequel la caravane passe comme il s’échine à aboyer. Sa hargne et sa vindicte ne rencontrent qu’un morne désintérêt chez le passant visé et c’est très bien ainsi, elles ne méritent pas plus. Qu’il soit roquet ou bien molosse, le clabaudeur ne fait pas peur. Il nous démontre qu’avoir une grande gueule ne suffit pas mais que c’est bien ce qui en sort qui en fait la valeur.
Plutôt que de l’ouvrir bien plus que de raison, le clabaudeur gagnerait à y tourner plusieurs fois sa langue acerbe : il se muerait ainsi en beau parleur. Mais le monde me semble ainsi fait que ceux qui y trouvent une place écoutée sont avant tout les vilains clabaudeurs plutôt que les discrets rêveurs. Quelle époque, quelle impudeur.