[la kur dy rwa péto] (loc. adv. ROY.)
Nul roi ou même roitelet, nul dictateur qu’il soit mal ou bien éclairé, nul président normal ou excité, nul responsable des trombones-agrafes-photocopieuse, nul chefaillon en charge de la clef des douches ne vous dira que diriger est chose aisée. Chacun d’eux sait toute la difficulté de l’ordre, de l’écoute des troupes et de leur juste châtiment si besoin est.
Il est cependant un monarque de légende qui vécut en expression sans qu’on soit sûr qu’il existât vraiment, dont on peut dire qu’il ne régna que sur un vaste foutoir : celui de la cour du roi Pétaud. Votre humble serviteur eut l’immense honneur d’y être admis à plusieurs reprises, notamment dans sa plus tendre enfance alors que Monsieur l’instituteur devait nous abandonner quelques minutes pour régler de menus problèmes que sa double casquette d’enseignant et de directeur d’école lui imposait. C’est lorsqu’il revenait dans sa classe devenue notre royaume que nous entendions qu’il était celui de la cour du roi Pétaud.
Ça nous faisait marrer ce souverain nouveau qui n’était pas dans la frise des rois de France collée au dessus du tableau mais qui valait dans son appellation les Louis le Gros, Childebert (je vous laisse imaginer pourquoi), Dagobert bien entendu, et autres Capétiens, Carolingiens, Valois ou Bourbons aux surnoms imagés. Selon notre intuition historienne d’alors, la cour du roi Pétaud devait être un endroit agréable à vivre puisqu’on pouvait y monter sur les chaises, faire des avions en papier, tirer du riz dans des sarbacanes de stylo Bic, et tirer les couettes des filles. Nous n’avions qu’à moitié tort.
Si la cour du roi Pétaud est bien un lieu d’absolu n’importe quoi et de binz total, son origine demeure floue, les latinistes voulant absolument y lire du peto (je demande), comme si un roi qui demande perdait alors autorité, les lettrés tractionnant pour que la référence soit celle du roy Petault cité dans un ouvrage de Rabelais dont je ne vous ferai pas croire que je l’ai lu. Peu importe, dans tous les cas la cour du roi Pétaud c’est le barnum, le chambard, le pastis, la pagaille, le bordel, le tohu-bohu et bien évidemment la pétaudière.
Après l’abandon des dernières communautés du Larzac à la fin des années 70 par des révolutionnaires bien heureux de pouvoir rentrer au chaud à Paris, l’idée même du fouillis spontané disparaît entrainant avec elle la cour du roi Pétaud. Et ce ne sont pas quelques modernes révoltes organisées comme des campagnes militaires qui pourront la faire revenir. La cour du roi Pétaud est surannée et bien surannée.
Gardarem lo Larzac qu’ils disaient… Les rigolos, ils n’arrivent pas à la hauteur de mes camarades de la communale.