[danino] (marq. dép. DESSER.)
De la nuance que diable, de la nuance ! Glacé n’est pas congelé et il eut été profitable au bon goût que les bricoleurs de la conservation par le froid en fassent preuve de cette fameuse nuance. Mais non. Il leur fallait du -18°C, du -24°C aussi, il leur fallait du froid polaire.
Avec leur folie des grands froids, ils ont bousillé les Danino.
En faisant passer le modeste freezer du réfrigérateur familial et son délicat -6°C, au moderne congélateur affichant fièrement ses quatre étoiles conservatrices symboles d’une météo Vostokienne¹, les tenants du toujours plus (en l’occurence devenus ceux du toujours moins pour faire toujours plus, oui la notion est complexe) ont détruit le milieu naturel du Danino qui, comme chacun sait, est celui du fond du compartiment à glace réglé au maximum du froid.
Comme nous le rappelle le mode de dégustation gravé sur le pot rond, « pour obtenir un Danino bien ferme, mettez-le bien à plat, sans empiler les pots, sur le fond du compartiment à glace de votre réfrigérateur, pendant 4 heures au moins. Réglez au maximum de froid. C’est tout ! Si vous désirez un Danino plus moelleux, réglez à mi-froid seulement. Danino peut aussi se consommer tel quel : laissez-le simplement au frais ».
Les vrais amateurs de Danino chocolat ou café qui apprécient le craquant de la glace puis la fraîcheur de la mousse savent que seul le deuxième compartiment du Frigidaire d’Electrolux ou de ses confrères et ses quelques degrés sous zéro permet de satisfaire leur exigence.
Tandis qu’il s’évertue à faire fondre la banquise sur laquelle l’ours blanc ne peut plus survivre (trop chaud), le moderne la recrée dans sa cuisine et remplace le freezer par le congélateur dans lequel Danino, lui, ne peut plus survivre (trop froid). Dans un même mouvement, l’ours polaire et Danino disparaissent en surannéité, victimes du grand froid domestiqué et du réchauffement qu’il engendre.
Sans ours ni Danino, la chaîne du froid c’est nettement moins sympa.