[dékròSé la têbal] (loc. verb. COCA.)
SYN. Bingo.
Dans les temps anciens du langage suranné, quand l’ascenseur social n’était même pas en panne puisqu’il n’existait pas, seul le mât de cocagne permettait de sortir de la fange. En parvenant au faîte de son érection lubrifiée fichée en place du village, le gueux pouvait espérer atteindre le filet garni ou mieux, décrocher la timbale.
Petit gobelet d’argent (ou d’or dans le meilleur des cas), la timbale valait son pesant de cacahuètes à la revente et assurait ainsi au grimpeur agile de quoi survivre pendant un bon moment (et l’admiration des donzelles du bourg qui ont toujours aimé les grimpeurs agiles mais ceci est une autre histoire).
Ainsi de fête des rillauds et du pâté aux prunes¹ en foire aux bestiaux, de petits bals perdus en comédiens installant leurs tréteaux, de festivals en carnavals, les forts en gueule chercheront à décrocher la timbale pour des lendemains qui chantent. Penauds pour les perdants, poisseux pour les gagnants (le mât est toujours enduit de graisse), tous redescendront toujours sur terre avec ou sans timbale.
Et c’est probablement pour ça que décrocher la timbale deviendra, la fête se terminant, synonyme moqueur de gros lot d’un jeu de dupes.
On dira par exemple du Jean-Louis qu’a marié la Mathilde qu’il a décroché la timbale, parce que la Mathilde… enfin bon vous voyez. On dira aussi de Perrette qui avait préféré décrocher la timbale en argent plutôt que ce petit pot de terre sans prétentions, qu’elle aurait mieux fait d’y réfléchir à deux fois, mais c’est la vie, c’est ainsi.
Cette mutation du sens propre vers un figuré, typique de la titilleuse langue surannée, se verra sèchement recadrée suite à la création de la Société de la Loterie Nationale et du Loto National en 1976, mât de cocagne moderne et seul véritable espoir de décrocher la timbale. Dans la foulée du premier tirage qui a lieu au théâtre de l’Empire le 19 mai de la même année, décrocher la timbale rejoint les rangs poussiéreux des expressions surannées, supplantée par le Loto c’est facile, c’est pas cher et ça peut rapporter gros nettement plus séduisant (et puisqu’après tout, tout est une histoire d’argent…).