[dy tâ u Zézy étè ɡarde Sâpètr] (loc. imposs. CATÉ.)
Bien avant les temps surannés, le temps courait déjà. C’est dire si ça date.
Si ces jours lointains ont avec Mathusalem¹ tout ce qu’il faut pour exprimer leur existence², il leur fallait aussi posséder une expression pour notifier qu’un fait peut ne s’y être jamais déroulé et n’être que le fruit d’une mémoire défaillante ou d’une pure invention.
Du temps où Jésus était garde champêtre est apparu comme le meilleur compromis à la traduction de cette double notion de temps anciens et d’événement improbable.
Du temps où Jésus était garde champêtre s’appuie bien entendu sur le curriculum vitæ de Jésus de Nazareth considéré comme connu par une majorité de la population, notamment grâce aux festivités liées à la célébration de son anniversaire (le 25 décembre) et plus généralement à la datation du moindre événement d’après sa naissance (vraisemblablement en 1 de lui-même mais ce n’est pas assuré).
Nul besoin d’avoir suivi un enseignement poussé des aventures du pèlerin pour entendre qu’il est plus qu’incertain qu’il ait pu s’engager dans la police rurale et embrasser la carrière de garde champêtre.
Certes quelques textes apocryphes lui prêtent le métier de charpentier – comme papa – jusqu’à sa trentième année, d’autres celui de maçon ou encore d’artisan tous corps d’État, mais aucun ne fait allusion à une quelconque activité liée à la maréchaussée campagnarde. Il est par ailleurs indiscutable que sa carrière prendra une toute autre dimension à partir de 30, ses activités d’alors n’étant pas cumulables avec une quelconque fonction de protection du domaine rural (mais ceci est une autre histoire).
Il apparaît dès lors que du temps où Jésus était garde champêtre peut être facilement comprise et utilisée par tout un chacun pour pointer une affabulation. Par exemple, on dira de tel chanteur qu’il a été un interprète brillant du temps où Jésus était garde champêtre ou qu’untel a tenu un discours cohérent du temps où Jésus était garde champêtre.
Le temps où Jésus était garde champêtre ne durera pas aussi longtemps que les contributions.
La locution est envoyée en surannéité un peu moins de deux mille ans après la naissance de son sujet, entraînée vers l’oubli par la baisse drastique des effectifs de la police de la pêche en eau douce et des chemins ruraux³ tandis que ceux des messies augmentent, brouillant irrémédiablement toute possibilité de comprendre son sens.
Une époque avec toujours moins de gardes champêtres et toujours plus de Jésus et de Christ en tous genres n’a que faire du temps où Jésus était garde champêtre.