[éSèl syrané de la sulòɡrafi] (éche. scien. NORM.)
Une échelle surannée de mesure de la soûlographie est désormais disponible pour tous ceux qui ont la dalle en pente. Elle permet de classifier correctement l’état de l’intéressé par la consommation de toute boisson alcoolisée selon des critères de syntaxes dûment validés, et ainsi de savoir s’il est temps de rentrer à pied ou si l’on peut encore attendre l’omnibus.
Le dictionnaire raisonné des mots surannés et expressions désuètes, avec des centaines de définitions rigoureuses en bidules, littératures, sciences, langues, arts, sports, pensées & élégances, est heureux de vous la proposer en exclusivité (ou presque, parce que les dictionnaires d’argot qui l’ont précédé l’ont tout de même bien aidé).
Niveau 1 : attraper une allumette ronde.
Attraper une allumette ronde c’est être légèrement ivre, pompette comme disent les femmes après une coupette de Champagne. Selon l’entraînement de l’individu, il pourra attraper une allumette ronde après quatre ou cinq Picon bières ou nettement plus tôt. Le symptômes ne sont guère visibles si ce n’est un regard légèrement hagard ou une euphorie amusante.
Niveau 2 : avoir son allumette de marchand de vin.
Avoir son allumette de marchand de vin consiste à s’avérer volubile sur n’importe quel sujet et à s’enorgueillir d’exposer son avis éclairé à qui voudra bien l’écouter. Le buveur qui a son allumette de marchand de vin en connaît autant sur les enjeux stratégiques du Moyen-Orient, les mœurs des puissants de ce monde, l’inflation au Honduras, la composition de l’équipe de France de football et la production automobile en Chine. C’est cet entendement pointu des choses de la vie qui permet de diagnostiquer le niveau 2.
Niveau 3 : prendre son allumette de campagne.
Prendre son allumette de campagne s’inscrit dans la continuité logique du niveau précédent avec une élocution approximative en sus. Celui qui prend son allumette de campagne s’exprimera de manière incohérente pour tout interlocuteur à jeun et de manière brillante et éloquente pour lui-même. C’est un stade au cours duquel l’incompréhension s’installe et peut créer des tensions qui ne trouveront apaisement que dans une tournée supplémentaire. Selon l’éducation du sujet prenant son allumette de campagne, le propos pourra muter en chanson paillarde braillée à pleins poumons.
Niveau 4 : avoir son poteau kilométrique.
Avoir son poteau kilométrique marque l’atteinte d’une borne de non retour à l’aide de quelque moyen motorisé que ce soit. Celui qui a atteint son poteau kilométrique est capable de rentrer chez lui en titubant et en chantant (les qualités des niveaux précédents se cumulent), mais rien de plus. Selon la numérotation du poteau kilométrique, il écorchera le renard ou non. Ce stade est aisément rejoint en cas de tentative d’oubli d’un échec sentimental.
Niveau 5 : avoir son poteau télégraphique.
Niveau ultime et hors concours que celui qui permet d’avoir son poteau télégraphique. La particularité de ce degré est l’effacement même de son souvenir. Il est dénommé comme tel car nombreux sont les individus adoptant une attitude déconcertante pouvant aller jusqu’à escalader un poteau télégraphique parce que « de là-haut on peut voir si les pingouins arrivent par la mer » ou « si les extraterrestres sont garés sur le parking du Macumba ». Le cas échéant, avoir son poteau télégraphique se terminera en coma éthylique.