[ètre makijé kòm yn vwatyr vòlé] (loc. auto. COSMÉT.)
S‘il est probable que le maquillage bariolait déjà les corps et les visages des décorateurs pariétaux¹ de ce qui n’était pas encore la Dordogne en ces temps d’avant le calendrier ab Urbe condita, s’il est certain qu’onguents, huiles parfumées, khôl et rouges à lèvres rendaient les reines de Saba ou d’Égypte encore plus désirables aux yeux du premier pharaon venu ou de n’importe quel roitelet, s’il est évident que le vol est aussi vieux que la première querelle de voisinage pour une histoire de mammouth domestiqué, il aura néanmoins fallu attendre 1896 et la fabrication des Panhard & Levassor et autres Peugeot pour voir émerger être maquillé(e) comme une voiture volée.
L’histoire attribue en effet au Baron Zulien la paternité de l’expression, l’aristocrate ayant été le premier à se faire dérober sa voiture² par des malfrats qui la maquilleront si bien qu’elle ne sera jamais retrouvée.
Être maquillé(e) comme une voiture volée est donc bien logiquement originaire de France, pays des bagnoles et des femmes élégantes.
Le sombre monde des méfaits et larcins ne bénéficiera par longtemps de la locution, celle-ci venant à s’appliquer dès le début du XXᵉ siècle aux grandes horizontales pomponnées excessivement afin d’éblouir les michetons fortunés (tel le Baron Zulien).
Cocottant puisque parfumées à outrance, les belles seront aussi maquillées comme une voiture volée à la manière d’une Fuego avec flammes sur portières ou d’une Golf GTi à spoiler paradant sur un parking de supermarché un dimanche de concours régional de tuning, afin d’arriver à leurs fins.
Être maquillé(e) comme une voiture volée connaîtra ainsi de bien belles années, une heureuse conjonction d’intérêts entre l’industrie automobile et la cosmétique faciale poussant à son usage quotidien.
Longtemps règneront pare-soleil Dédé et Valérie³, fard à paupières vert et jaune façon Boy George, volant avec la moquette³ et smoky eyes de Pandi-Panda (petit ourson de Chine, Pandi-Panda, né dans l’Himalaya – même si ceci est une autre histoire) assurant son succès.
Les cartels du rouge à lèvres à effet velours et du recourbe-cils pour un regard de braise qui dure vraiment longtemps décideront de bannir l’expression vers le milieu des années 80, quand l’automobile française perdra ce qui lui restait de dignité avec la production de la Bx sport et son aileron ridicule, qui sort d’usine maquillée comme une voiture volée.
Dépassée, la locution qui se gaussait des excès cosmétiques s’enfonce en surannéité.
Elle y rejoint les demi-mondaines trop fardées et les berlines bien carrossées.