[ètre rebifé kòm la pul a ɡro Zâ] (loc. verb. COTCOT.)
Être ou paraître est un débat qui anime philosophes et rodomonts depuis la nuit des temps. Et la dispute entre les deux est particulièrement vive lorsqu’il s’agit d’être sérieux ou d’affecter de l’être.
Dans les temps surannés où les gens d’esprit tenaient encore un rang que ceux plus portés sur l’accoutrement et l’attitude faussée leur raviraient bientôt, existait une expression pour décrire le fat enflé de sa gloriole autoproclamée : être rebiffé comme la poule à Gros-Jean.
Créée sur la base d’une observation scrupuleuse d’un gallinacé de basse-cour appartenant de toute évidence au même individu benêt que l’on trouve dans Gros-Jean comme devant, être rebiffé comme la poule à Gros-Jean rendait compte à la perfection de l’infatuation ridicule du personnage concerné par l’appellation, grâce à sa construction gauche et pataude (préposition « à » notamment).
On lira aisément dans être rebiffé comme la poule à Gros-Jean le poitrail gonflé du matamore de pacotille, la démarche sur ergots et l’ego boursouflé de celui qui croit être. Rarement enchaînement de mots aussi communs et style aussi quelconque auront su produire un tel effet. Être rebiffé comme la poule à Gros-Jean tient de la formule magique tant elle sous-entend à merveille la médiocrité de la poule, et, conséquemment, celle de celui qui se pavane.
Le panache penaud de quelques plumes fades
Être rebiffé comme la poule à Gros-Jean nous dit l’œil exorbité et la démarche saccadée, le port de tête hargneux et son balancement d’avant en arrière contraire à celui du corps, le pied qui s’affaisse dans la fiente et le panache penaud de quelques plumes fades qui ne serviront même pas à rédiger le moindre courrier. Rien qui vaille mieux dans l’attitude que celle d’un poulet ridicule.
Est-ce le nombre de poules ou celui d’olibrius qui fera le succès d’être rebiffé comme la poule à Gros-Jean ? Nul ne le sait vraiment, mais l’expression qualifiera pendant des années le sot ne craignant pas de l’être, et ce qu’il soit des champs ou des villes.
C’est l’onomatopée rendant compte de l’entrechoquement de breloques dorées et autres signes ostentatoires de vulgarité assumée qui enverra être rebiffé comme la poule à Gros-Jean en surannéité.
Arrivée par effraction et surtout maquillée comme un camion, bling-bling remplit en modernité la fonction du plumage de poule d’avant : celle de donner à paraître sans être. Sa répétition la rend plus facile à prononcer qu’être rebiffé comme la poule à Gros-Jean. C’est plus pratique.