[fɛʁ la ʁy miʃɛl] (exp. FAM.)
Il est des expression surannées qui fleurent bon le Pantruche du XIXᵉ siècle, l’atmosphère confinée du fiacre, le bec de gaz et la canne-épée prête à pourfendre le vilain, et qui de fait sont surannées.
Ainsi en va-t-il de faire la rue Michel. Cet ancien chemin de ronde de l’enceinte parisienne, sis dans l’actuel Marais (métro Rambuteau et Arts et Métiers pour les tatillons), pris le nom de rue Michel-le-Comte vers 1270, selon toute vraisemblance en hommage à un noble quelconque. Rien de bien notable donc¹.
Et pourtant, ce fut un boulevard vers le doux suranné…
Est-ce pour cause de confusion entre le Comte et le compte que faire la rue Michel fut affublée quelques siècles plus tard du sens qu’on lui connait désormais, celui d’une dette apurée ou plus largement d’une bonne convenance ? Deux homophones et une mésentente orthographique à l’origine d’une truculente surannéité ? Pourquoi pas après tout, il en faut parfois moins.
Le compte est bon, ça fait la rue Michel
Placée fort à propos, faire la rue Michel apportera une touche gavrochienne en conclusion d’un discours de négociation bien menée au contenu policé. Une légère note dite « des boulevards » que je vous conseille afin de mâtiner votre acceptation d’une connivence de bon aloi, d’une complicité de comptoir, d’une subtilité rimbaldienne qui vous catégorisera en poète des faubourgs. Un coté bad boy qui saura plaire en toutes circonstances, surtout aux femmes, croyez-moi sur parole.
Attention toutefois à ne pas abuser : ça fait la rue Michel ne s’emploie pas en signature d’un contrat de travail (on se contentera de la traditionnelle mention « lu et approuvé »), d’une demande en mariage (un simple oui ému suffira à la postérité) ou d’un traité de paix international (toujours empreint d’une certaine solennité, je n’y puis rien).
Sachez rester digne et raisonnable, et ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit : tout ne peut pas faire la rue Michel que diantre !