La famille Gauthier [la famij gotie]

Fig. A. Le fils et la fille Gauthier.

[la famij gotie] (N. FAM. PARAS.)

On compte en France tant de familles portant le nom de Gauthier qu’il est peu probable de découvrir un jour celle qui a agit si mal que la langue a décidé de faire de ses membres des poux. Oui, le représentant de la famille Gauthier est bel et bien synonyme de l’insecte parasite dans la jactance codifiée des bas fonds (et celle des merlans).

Être visité par la famille Gauthier garantit un shampooing Marie Rose® (marque déposée depuis 1922) voire une boule à Z façon incorporation du bleu bite chez les paras. Quand ça gratouille dans la crinière il n’y a (dans les temps surannés) d’autre solution pour déloger l’encombrante smala. Bien dégager derrière les oreilles pour expulser la famille Gauthier, voilà la recette d’alors.

On se perdra en conjectures sur l’origine de l’infâmie pour les Gauthier. Un ancêtre laid comme un pou ? Un autre vexé suite à une remarque ? Ou alors un jaloux peut-être (il est à peu près certain que quelque Gauthier se soit montré un jour jaloux, mais de là à en faire une montagne…). La famille Gauthier fait partie de ces rares expressions inexpliquées et pourtant usitées.

Notons que c’est l’ensemble de la cellule familiale qui est concerné par l’opprobre, sans distinction entre fils, fille, neveu, cousin, grand-père et aïeul lointain. Tout membre de la famille Gauthier est un pou, un point c’est tout. D’après les données de l’INSEE, le nom de famille Gauthier se situant à la 40e place des noms les plus portés à la naissance en France depuis 1891, ça en fait des totos en puissance depuis plus d’un siècle.

Inutile cependant d’aller chercher des poux dans la tête à près de soixante mille personnes : ces braves gens n’y étaient et n’y sont toujours pour rien. Supportant le poids de l’inexpliquée expression leurs descendants continuent chaque jour à graver fièrement famille Gauthier sur leur boîte aux lettres, à faire part de leurs joies et de leurs peines dans les rubriques adéquates des canards locaux en signant de leur patronyme commun. Soudés par la patronymie ils ont tous patiemment œuvré à éliminer l’anoploure et le morbac.

Le gratteur du cuir chevelu s’est d’ailleurs peu à peu retiré du lexique, la doctrine hygiéniste étant passée par là. Il n’est plus guère de péquin se rendant chez le coupe-tifs la crinière habitée. Tout juste l’élève Gauthier se gratte-t-il encore la tête avant de se remémorer la règle des mots en -oux : viens mon chou, mon bijou, mon joujou, sur mes genoux, et jette des cailloux à ce hibou plein de poux.

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