[lɑ̃ dø mill] (gr.n. TEM.)
Attention ça va te faire un choc. Eh oui mon p’tit gars, je le crains : l’an deux mille est suranné.
Il fallait que je te le dise.
Je sais que c’est dur à entendre, je comprends que tu trembles, que tu sois en colère, mais c’est bien la réalité, l’an deux mille appartient au passé le plus suranné.
Te souviens-tu de ces voitures volantes que tu lui destinais sur tes dessins d’enfants ? De ces villes grandioses où l’on allait tous vivre en paix ? Te rappelles-tu de son école ultra-moderne ? Tu avais imaginé l’iPhone et Internet bien avant tout le monde. Mais ce n’est pas tout à fait ça; les bagnoles boivent toujours du pétrole et la cité des poètes n’en abrite pas beaucoup. On a passé l’an deux mille depuis quelques années seulement et il est devenu suranné plus vite que mille choses du siècle précédent. C’est amusant ce pied de nez, tu ne trouves pas ? Le temps vieilli plus vite que les objets et les mots. Pourtant on en avait rêvé de ce compte rond, de ce siècle et de ce millénaire qui allaient voir ce qu’ils allaient voir. On l’attendait avec une telle impatience ! Il n’a pas changé grand-chose.
On attend trois mille en écoutant Souchon ou on se met au boulot ?
Tu la voyais pas comme ça ta vie,
Pas d’attaché-case quand t’étais p’tit,
Ton corps enfermé, costume crétin,
T’imaginais pas, j’sais bien.
Moi aussi j’en ai rêvé des rêves. Tant pis.
Tu la voyais grande et c’est une toute petite vie.