[marjaZ de Zâ dé viN] (appell. contrôl. NUPTIA.)
Même la langue bien pendue des braves gens qui n’aiment pas qu’on suive une autre route qu’eux¹ toujours prête à tailler un costard à qui emprunte les chemins de traverse, savait puiser dans le registre crypté pour faire connaître sa pensée.
Et celle-ci était acide quand il s’agissait de ceux consommant des épousailles qui n’avaient pas eu lieu. Car on ne chipote pas avec la morale dans les temps surannés.
D’une union sans bans ni marche nuptiale de Mendelssohn (ou de Wagner) il se disait alors que c’était un mariage de Jean des Vignes, soit un vulgaire concubinage se cachant sous l’apparence d’un mariage ratifié par l’administration régulière ou céleste. Mensonge, horreur, malheur² !
D’aucuns ont voulu refourguer l’origine de l’expression à Jean II le Bon, piètre stratège qui offrit la bataille de Poitiers à l’Anglois en faisant charger ses gens d’armes dans les vignes et obtint en retour l’une des cinglantes défaites de la guerre de Cent Ans et le surnom de Jean des Vignes.
D’autres, minoritaires, prétendent que ce fiasco fut le début d’une histoire entre maréchaussée et monde viticole, et que c’est mariage de gens des vignes qu’il faut écrire pour être juste. L’orthographe imposera Jean, conférant plus de crédit à la première hypothèse qu’à celle, fantaisiste, de gens d’armes portés sur le jaja.
Tout homme malavisé devient donc Jean des Vignes dès le lendemain du 19 septembre 1356 et il en est évidemment ainsi du coquin qui convole en bien injustes noces selon ces braves gens qui n’aiment pas qu’on suive une autre route qu’eux (cf. princeps) vraisemblablement un peu jaloux qu’untel puisse consommer une idylle sans pâtir des cocasseries quotidiennes³ (mais ceci est une autre histoire).
Imprimatur aidant, le mariage de Jean des Vignes décrira perfidement ces unions un peu trop libres pendant un temps certain, lui permettant de jouer opportunément avec la langue.
— « Tu les trouves jolies, mes fesses ? »
— « Oui, très »
Venu avec les temps modernes, c’est le relatif assouplissement de la position des missionnaires de l’église catholique apostolique et romaine sur la question matrimoniale qui permettra au mariage de Jean des Vignes de perdre de son fiel, celui-ci n’étant plus jeté au visage de la moindre jouvencelle s’essayant avec un prince assez charmant pour ne pas lui demander sa main tout en se ravissant de son cœur si joli.
Soulageant au passage la postérité d’un Jean II le Bon un peu lassé de passer pour des Vignes depuis des siècles et ce faisant un peu rendu responsable de la durée de la guerre de Cent Ans, cette retraite en surannéité du mariage de Jean des Vignes ne fâchera personne.
Ni les phobiques administratifs pouvant toujours se marier à la mairie du XIIIᵉ, ni les béni-oui-oui des sept sacrements évidemment.