[mâtër kòm ê sutjêɡòrZ] (loc. nom. ROBER.)
Pauvre petit homme de bois fabriqué pour condenser toutes les affres du mensonge, pauvre Pinocchio dont la longueur du nez indexa trop longtemps la tromperie (une charge un petit peu allégée grâce au partage avec l’arracheur de dents, fieffé menteur lui aussi).
La marionnette de bois qui apparaît pour la première fois en 1881 devra attendre 1932 et la parution de Voyage au bout de la nuit, excusez du peu, pour se libérer de son fardeau. Louis-Ferdinand Céline est en effet le premier à officialiser menteur comme un soutien-gorge comme quintessence du bobard.
Avec menteur comme un soutien-gorge c’est le petit robert¹ qui est visé. Le sens profond de l’expression consiste à affirmer que s’il y a du monde au balcon il n’est pas nécessité d’apodesme ou de mastodeton pour le prouver et que la brassière n’est alors qu’un Pinocchio de soie ou de dentelle.
Remplaçant le contraignant corset, le soutien-gorge vient donc mentir sans qu’on le sache dès la fin du XIXᵉ siècle où il est breveté, puis, de coussin gonflable (le modèle Very Secret) en pigeonnant affriolant s’enfonce dans la fanfaronnade. Menteur comme un soutien-gorge dépasse alors toutes les autres expressions sur l’échelle du charlatanisme.
À l’aube de l’ère moderne, le bonimenteur se verra brûlé en place publique, non par volonté de rétablir une quelconque vérité mais parce que jugé oppressif par les unes, inconfortable par les autres. Notons que son cousin moins trompeur, le haut de bikini, ira quant à lui jusqu’à disparaître totalement, contribuant à envoyer en surannéité menteur comme un soutien-gorge : pourquoi mentir s’il n’y a rien à cacher ?
Menteur comme un soutien-gorge ne renaîtra jamais, rendu inutile par les progrès du silicone et de la chirurgie (parfois exercée par des gougnafiers vénaux) au grand bonheur ou au grand dam des observateurs, c’est selon.
Nous ne saurions nous prononcer sur le fond et encore moins sur la forme.
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