[méziɡ] (pron. MOI)
Si ce n’est on, dont on dit qu’il est un con sans qu’on ne l’ai jamais pu réellement prouver (mais ceci est une autre histoire), les pronoms personnels singuliers et pluriels font l’objet des premiers apprentissages de la langue, quand bébé bave encore et balbutie mais qu’il va bien devoir apprendre qu’il y a une grammaire en ce bas monde, et que tout nouveau qu’il soit, il n’en est pas exonéré.
Je, tu, il (elle), nous, vous, ils (elles), seront donc appris afin que le rejeton sache quelle est sa place, un peu comme le fameux moi Jane, toi Tarzan remet l’homme singe dans la civilisation. Notons cependant qu’Edgar Rice Burroughs pas plus qu’aucun metteur en scène peu porté sur les compléments d’objets directs ou indirects, n’écrivirent jamais ce raccourci qui fit frémir les barbacoles, ceux-là mêmes qui toléraient pourtant dans les rédactions des années surannées l’emploi de mézigue, tézigue, cézigue.
Il faut dire que mézigue n’était pas à proprement parler une faute de grammaire ; juste un pronom en provenance de la frange d’en bas, celle qui s’agitait aux Halles ou trimait à Billancourt et qui jactait l’argomuche. Pas de quoi justifier un zéro pointé.
La tournée c’est pour mézigue !
C’est mézigue pour se désigner comme l’auteur ou le destinataire, c’est tézigue pour toi et cézigue pour lui; simple. Mézigue possède des synonymes comme bibi ou ma pomme mais ceux-ci ne se classent pas véritablement comme pronoms, encore qu’on puisse en discuter.
Mézigue est de toute évidence une construction à partir de l’adjectif possessif pluriel mes et du substantif masculin zigue, laissant poindre une certaine admiration de l’émetteur sur sa propre personne puisque le zigue en question est une camarade enjoué et qu’il est peu commun de parler de soi au pluriel (hors dédoublement de la personnalité ou exercice du métier de roi de France).
Mézigue disparaît soudainement du langage, précisément entre le 27 février et le 1er mars 1969, dans le sillage des 20 000 zigues qui quittent les Halles et le cœur de Paris pour aller vivre leur vie à Rungis. Dès lors, devenu moderne et se tenant loin de la gouaille, le Parisien aura plutôt tendance à dire moi-je plutôt que mézigue¹. La modestie y perdra beaucoup.