[ne ply avwar de Saplyr o Zâbòno] (expr. moq. CAPILL.)
L‘héritage gaulois qui marque la langue française ne s’est pas exprimé uniquement dans les chansons à boire ou l’ancestrale crainte que le ciel ne nous tombe un jour sur la tête.
La puissance attribuée à la chevelure la plus fournie possible fait aussi partie du lot légué par l’Histoire.
En Gallia comata (Gaule chevelue) comme disent les Romains pour désigner les terres à l’ouest du Rhône, on porte la nuque longue ou le chignon quand on est un homme un vrai, un dur, un guerrier. Le chauve est marginalisé et il n’est guère étonnant que lui soit attribué le défaut de ne plus avoir de chapelure au jambonneau durant les nombreuses années surannées qui suivront le siège d’Alésia¹ (-52).
Pour rappel la langue ne se gausse jamais méchamment et organise ses mots en un ballet subtil qui fera comprendre son propos sans humilier, et elle possède un faible pour le registre gastro-culinaire quand il s’agit d’imager.
Être chauve peut donc se dire ne plus avoir de chapelure au jambonneau sans mettre au ban le dégarni tout en puisant dans le filet garni qui contient souvent une dose de charcuterie.
Pour le jambonneau rond et rosé il est en effet acquis qu’il faut être saupoudré de chapelure pour se présenter sur l’étal du charcutier et donner envie au gourmand, un froufrou vert noué sur l’os mettant la dernière touche à cet ensemble séduisant (on peut découper du cochon à longueur de journées et n’en être pas moins sensible aux détails esthétiques). Et c’est de cette évidence que procède la rieuse ne plus avoir de chapelure au jambonneau.
L’empire romain aura beau chuter en 476, Clovis s’en tient à la chevelure longue et l’expression se transmet de père en fils tout comme la taquinerie des déplumés.
Un imprévu revirement de la mode capillicole va cependant bouleverser l’ordre des choses à la fin des années surannées.
De nombreux footballeurs, des stars de séries télévisées, des chanteurs abandonnent soudainement la nuque longue² (ou mulet), certains n’hésitant pas à afficher une boule à zéro que seuls Telly Salavas et Yul Brynner avaient pu jusqu’alors assumer.
Ne plus avoir de chapelure au jambonneau disparaît du vocabulaire capillaire en quelques mois.
Laurent Fabius, jeune premier ministre et chauve penaud, est le dernier à tenter de masquer sa calvitie en ramenant la banlieue en centre-ville. Il sera aussi le dernier à qui on reprochera de ne plus avoir de chapelure au jambonneau (ainsi que quelques autres agissement mais qui sont là d’autres histoires).