[ne pa truvé do a la rivjèr] (loc. verb. AQUA.)
H2O qu’il soit solide, gazeux ou liquide et dont on compte 1 360 000 000 km3 sur notre bonne planète est l’élément vital par excellence. Même ceux qui sont plutôt portés sur le Perniflard le reconnaissent : sans eau, point de vie. Alors que ce soit pour se désaltérer ou y faire des ronds histoire de passer le temps, il vaut mieux en avoir à portée de main ou, le cas échéant, savoir où la trouver : la vie est une histoire d’eau.
À l’époque surannée, on peut aller la quérir avec seau et broc, au puit, à la source ou à la rivière. La corvée d’eau fait partie des servitudes de l’organisation de la maisonnée, tout un chacun n’étant pas en mesure de bâtir des canaux compliqués pour abreuver son foyer, tel un Nabuchodonosor II détournant l’Euphrate pour irriguer ses jardins suspendus de Babylone. De ce bâtisseur d’une des sept merveilles du monde (et destructeur du Temple de Salomon) nul n’aurait pu dire un seul instant qu’il n’aurait pas trouvé d’eau à la rivière¹.
Expression gentiment réservée à l’idiot du village, ne pas trouver d’eau à la rivière est l’une de ces litotes refusant de blesser celui qui se trouve différent et à qui on ne peut destiner certaines tâches sous peine de se trouver fâché. Envoyer chercher de l’eau celui qui ne trouverait pas d’eau à la rivière est la quasi certitude de se retrouver le bec dans l’eau, sans pouvoir pour autant trop le lui reprocher car il reviendra certainement avec des fleurs ou bien des champignons.
Ne pas trouver d’eau à la rivière est une incompatibilité avec l’organisation de la majorité des hommes, pas une volonté de se faire remarquer; la langue bienveillante l’avait bien vu et laissa tranquillement le dissemblant contempler les étoiles et jouer avec les coccinelles.
Si l’on peut marquer comme un progrès l’œuvre canalisatrice des sous-sols de la capitale dirigée par ce bon Baron Georges Eugène Haussmann, l’arrivée de l’eau courante et de son corollaire le tout à l’égout aura cependant d’induites conséquences que l’histoire refuse de regarder. Ne pas trouver d’eau à la rivière, devenu inutile avec le robinet, va disparaître. Et ce faisant, le différent se couvrir de qualifiants plus ou moins infamants. Nous ne leur donnerons ici aucune publicité.
En cachant en surannéité le trop tolérant ne pas trouver d’eau à la rivière, la modernité n’a cependant pas résolu la question, sauf à penser que le milliard d’êtres humains n’ayant aucun accès à l’eau potable à l’heure où nous mettons sous presse, est bien trop insignifiant pour ça. Pas son genre…