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Pas si vite Père Joseph [pa si vit pèr Zozèf]
Fig. A. Richelieu et le Père Joseph.
[pa si vit pèr Zozèf] (loc. calm. INTEL.)
Une forme de sagesse populaire dit du con qu’il ne doute de rien.
Si l’apophtegme est le fruit du vécu¹, il omet un peu vite de préciser qu’il est aussi des empressés brillants qui eux non plus ne doutent pas, sans pour autant s’avérer abrutis.
C’est pour ces malins-là que Richelieu lui-même, excusez du peu, a créé pas si vite Père Joseph.
S’adressant à son homme lige, François Leclerc du Tremblay, alors connu sous le patronyme de Père Joseph puisqu’ayant rejoint l’église après avoir zigouillé de l’ennemi à gogo pendant la huitième guerre de religion (mais ceci est une autre histoire), le cardinal souhaitant souligner que le bonhomme allait un peu vite en besogne dans l’élaboration d’une nouvelle stratégie de bataille lui lançait le premier pas si vite Père Joseph qui devait en engendrer bien des autres dans les siècles qui suivirent.
La parole du ministre d’État valant son pesant de cacahuètes, pas si vite Père Joseph fut adoptée dans l’instant et diffusée dans tout le royaume pour calmer les ardeurs des plus rapides que la musique, aussi visionnaires soient leurs spéculations.
Pas si vite Père Joseph s’appliqua dès lors à tout effervescent de la pensée, tout remuant des méninges, tout grisé de la matière grise, qu’il soit capucin ou simple péquin. Dans un pays où déjà on n’avait pas de pétrole mais des idées (et pas qu’un peu), la remarque cardinale s’épanouit à qui mieux mieux.
L’expression s’applique à tout grisé de la matière grise, capucin ou simple péquin
Cheminant ainsi au fil des idées d’excités, pas si vite Père Joseph confirma ses lettres de noblesses et celles de clergé en devenant l’une des expressions préférées des Français.
Et contrairement aux apparences, ce n’est pas le frottement avec minute papillon qui causa la chute de pas si vite Père Joseph, l’une ne s’avérant au final pas tant synonyme que ça de l’autre, ni même les histoires de Père Castor contées aux enfants sages des années surannées.
Surprise s’il en est, en 1944 c’est l’almanach Spirou qui le premier plante une banderille moderne dans le flanc de la quasi quatre fois centenaire expression en la présentant en ses pages comme sommet de la désuétude.
Fig. B. Almanach Spirou, 1944.
Pression de l’occupant ? Volonté délibérée de se placer à l’avant-garde ? Anti-cléricalisme primaire ? Les thèses sont nombreuses, les preuves inexistantes. Mais en ces temps noircis par l’infamie, pas si vite Père Joseph commence à battre de l’aile, poussée en surannéité par l’illustré.
L’époque qui s’avance n’aura bientôt que faire des penseurs trop célères.
C’est du process (comme elle dira bientôt) qu’elle veut, de la réunion ennuyeuse, du Power Point® avec des effets tourbillonnants et de l’idée en boîte. Pas de ce moinillon véloce.