[pèrniflar](subst. 51°)
S‘attaquer à la définition d’un pan suranné de la culture populaire française n’est pas chose aisée.
Mais vous le savez bien, ici il en faut beaucoup plus pour nous faire renoncer (d’ailleurs nous n’avons jamais renoncé à quoi que ce fut). Bien entendu nous allons rencontrer des écueils, croiser des jusqu’au-boutistes spécialisés dans la spécialisation, entendre crier haro sur le baudet, évidemment nous devrons ferrailler, mais croyez-vous vraiment que la chose nous effraie ?
“René, tu nous mets de la glace, de l’eau fraîche et tu nous sers un Perniflard !
Le Perniflard est dans cette France qui sent bon la garrigue et sieste sous l’entêtant crin-crin des cigales estivales une sorte de monument devant lequel viennent quotidiennement se prosterner des milliers d’adorateurs. Boisson apéritive anisée à quarante-cinq degrés d’alcool à la robe jaune or virant laiteux quand l’eau vient la chahuter, le Perniflard est le nom de comptoir du Pernod, accessoirement plus ancienne des marques d’anisés français. Je vous l’ai dit on fait dans le monumental.
Créé en 1951 (année surannée), le Pernod 51 est l’héritier du Pernod 45 (lui-même créé en 1938, mais titrant 45°), qui deviendra Pastis 51 en 1954 et puis 51. Vous suivez ?
“René, tu nous remets la p’tite sœur s’il-te-plait !
Nous en sommes donc aux années 60, alors que le 51 est dénommé ainsi depuis 54. Trop compliqué pour un esprit qui aime que les choses soient claires (surtout en matière de pastis) et fleurent bon la tradition. Perniflard voit le jour dans quelque bistrot de France ou de Navarre, des recherches poussées positionnant l’épicentre de la création spontanée du nom dans un petit village des Bouches-du-Rhône mais l’étude en question n’ayant jamais pu être consultée par nos soins nous demeurons circonspects.
Pas bégueule pour deux sous puisqu’il est français, le Perniflard ne rechigne jamais au mélange. Avec une rouge grenadine il devient une « Tomate », avec un peu de menthe il est un « Perroquet ». Seuls les tenanciers de bouges surannés en connaissent encore les justes proportions, l’époque moderne étant plutôt à l’assemblage avec de la vodka ou de la limonade. N’y voyez cependant rien d’autre que du marketing pur et dur, la nécessité de relancer une de ses marques d’eau-de-vie de pommes de terre ayant donné à la maison Pernod-Ricard l’idée forte opportune de la mélanger au Perniflard…
En conclusion je vous rappellerai (parce que je vous aime bien) qu’il convient d’allonger le Perniflard d’un peu d’anisette de barbillon¹ et d’y ajouter trois glaçons, de préparer les olives et les arachides salées sans lesquelles ce ne serait pas tout à fait l’été. À la vôtre.