[pròpozé la bòt] (loc. libid. ESCRI.)
Du bruit que font celles des barbares marchant au pas de l’oie à celles de foin au cœur desquelles il est pour le moins agréable de faire la sieste en passant par celles de sept lieues, les bottes occupent une place de choix dans le bréviaire suranné.
La botte dont il est question quand elle est proposée n’est cependant aucune de ces trois modèles, même si les coquins adeptes de la sieste crapuleuse lui trouveront une proximité avec la deuxième.
Proposer la botte consiste en effet à soumettre sans préambule à une donzelle l’idée de prendre le café du pauvre ou de lui montrer sa collection d’estampes japonaises.
La formule est directe car elle provient de l’estocade portée en duel par la botte de Nevers, cette technique secrète imaginée en 1858 par Paul Féval pour que le chevalier Henri de Lagardère puisse embrocher les vilains.
Usant de sa botte à qui mieux mieux, le héros de roman de cape et d’épée fera passer à une postérité pas vraiment envisagée cet art de l’introduction sans préliminaires, l’esprit salace d’anonymes grivois se contentant de transformer la lame en gourdin pour que l’expression prenne son sens libidineux.
Il ne faudra bien entendu que peu de temps pour que proposer la botte s’épanouisse pleinement, les choses allant toujours vite quand il s’agit de causer bagatelle.
Avant même le début du XXᵉ siècle les pressés du Colosse, les Isidore et les Jules excités, et tous ceux entendant mener Totoche à Medrano dans les plus brefs délais font de proposer la botte une expression à la mode.
La gent féminine rempli de bottes ses placards tant on lui en propose alors.
🎶These boots are made for walking
And that’s just what they’ll do
One of these days these boots are gonna walk all over you
L’évolution des mœurs va frapper un grand coup en débutant une révolution dès 1966 avec une Nancy Sinatra qui n’entend pas se laisser berner par les avances insistantes et empressées d’un homme plus âgé qu’elle.
La belle balance en chanson ses boots made for walking¹ dans les roubignoles du macho et n’hésite pas à le piétiner (« one of these days these boots are gonna walk all over you »), envoyant valser en même temps ce proposer la botte qui n’est pas à son goût. Le succès est planétaire.
Pour que le message soit bien clair, Eileen adapte les paroles en français. Le 45T fait un carton et proposer la botte fait ses cartons, direction les oubliettes des expressions surannées.
À Nevers comme ailleurs la botte se contente désormais de chausser les pieds et les mollets des élégantes² qui décident d’elles-mêmes du modèle qu’elles vont enfiler, n’en déplaise aux phallos.
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