[se tòrSé le ky avèk dé pjèr plat] (loc. verb. PQ.)
Que ne faut-il pas inventer pour exprimer dédain voire mépris ! Quand s’en tamponner le coquillard ne suffit plus, quand en toucher une sans faire bouger l’autre n’est pas assez clair, quand s’en battre les c******* avec une pelle à tarte est trop vulgaire, il ne demeure plus qu’une seule expression : se torcher le cul avec des pierres plates.L’image est frappante pour l’imagination et on plaint par avance le pauvre hère obligé à une telle vilenie. Déjà que le papier journal découpé en carré, même froissé ça irrite le fessier, alors la pierre plate, pour peu qu’en plus elle soit ponce…
Se torcher le cul avec des pierres plates est tellement impossible que l’affirmation ne laisse aucune ambiguïté sur l’état d’esprit de son affirmateur : il n’a que faire de la situation. À un point tel que lors de son prochain passage dans la cabane au fond du jardin il pourrait procéder à une toilette anale au caillou, et conséquemment s’en mettre plein les mains (c’est là tout le ressort répulsif de l’expression pour en marquer l’incongruité).
Paradoxalement (?), la langue fait appel au séant pour décrire l’état d’esprit.
Se torcher le cul avec des pierres plates n’est aucunement de l’ordre de l’intention hygiéniste élémentaire mais transcrit un désintérêt intellectuel profond, un néant. Opposée dans une conversation (« Je m’en torche le cul avec des pierres plates« ), l’expression n’attend aucune réponse et clôt la discussion. L’effroi de la projection suscitée chez le débatteur le conduira au bord de la nausée, et même s’il n’écorche pas le renard, sa mémoire olfactive lui intimera l’ordre de fuir.
Notons cependant que lors d’une joute oratoire avec un interlocuteur n’ayant pas dépassé le stade anal (pour rappel entre dix-huit mois et trois ans chez l’humain), se torcher le cul avec des pierres plates peut éveiller un certain intérêt voire pousser à l’expérimentation. Cela dit, d’une manière générale s’opposer à un enfant de trois ans ou débattre avec lui est vain.
Pour le chercheur qui se penchera sur l’histoire des latrines, se torcher le cul avec des pierres plates revêt un sens quelque peu différent. Au VIIIᵉ siècle, lors de l’ère Nara, le samouraï ou tout autre membre de la société japonaise utilise le chuugi pour se laver le fessier, soit un bâton de bois d’une vingtaine de centimètres dont nous vous laissons imaginer l’usage. Et il se pourrait bien que les fragments de céramique retrouvés dans les fosses septiques de la Rome antique aient eu des fonctions postério-nettoyantes. Pour le savant, se torcher le cul avec des pierres plates n’est donc point incongru.
Procter&Gamble, parangon de l’hygiène moderne dominant un marché marché français de près de huit cents millions d’euros, mettra fin au doute en diffusant massivement dès les années d’après-guerre du papier bulle-corde lisse (appelé ainsi pour sa couleur corde), puis du papier crêpé parfois un peu fragile (…), puis de la ouate de cellulose simple, double et même triple épaisseur pour les petites fesses fragiles.
Se torcher le cul avec des pierres plates en deviendra surannée, sans aucune utilité, incompréhensible. Une expression imagée qui disparaît, même cradingue, c’est toujours un crève-cœur.