[sèk kòm lé kuj a topê] (loc. nom. AMEN.)
Dans une contrée où la cuisine est de l’ordre des arts, la langue se devait d’établir des conventions visant à rendre la perception organoleptique compréhensible par tous. À condition de maîtriser la syntaxe surannée, bien entendu.
Tout amateur de pâtisserie comprenait ainsi le déjà très évocateur étouffe chrétien pour désigner un gâteau forçant sur la farine, mais certains critiques, catholiques réticents à l’utilisation d’une image pieuse pour décrire le pâteux, se trouvaient démunis en mangeant une part d’immonde cake aux olives à la kermesse de l’école Sainte-Marie-Madeleine.
Ce pourquoi, afin de ne pas blasphémer mais de faire connaître leur courroux, ils créèrent sec comme les couilles à Taupin.
Grâce à des recherches poussées, nous pouvons affirmer qu’il est fort possible que le bonhomme désigné pour sa sécheresse testiculaire soit l’abbé Taupin, curé de Soulanges, « un gros prêtre retiré dans sa cure, comme le rat dans son fromage » comme nous le décrit Honoré de Balzac dans sa Comédie humaine.
Cette hypothèse encore parfois discutée, est beaucoup plus probable que celle mettant en scène le coléoptère dévoreur des récoltes portant, lui aussi, le nom de taupin. Car qui mieux qu’un homme d’église pour évoquer l’étouffe chrétien sans froisser les croyants ?
Sec comme les couilles à Taupin se répandit ainsi dans le pays, au fil des recettes trop riches et des gâteaux ratés, des kermesses ennuyeuses et des apéritifs roboratifs. Autant dire qu’il trouva de quoi s’épanouir.
La passion grandissante des modernes pour l’expérimentation culinaire¹ aurait dû lui assurer un avenir radieux mais las, des tenants du soi-disant bon goût décidèrent qu’il était du genre vulgaire. Avoir en bouche sec comme les couilles à Taupin n’est pas apprécié du gourmand contemporain qui a même rejeté en surannéité l’étouffe chrétien des origines.
Cet apeuré du langage suranné pourrait même aller jusqu’à prétendre qu’il apprécie le cake aux olives de la kermesse de l’école, histoire de ne pas prononcer sec comme les couilles à Taupin !
Piteux péteux que voilà, que les couilles de l’abbé effrayent… Que le diable l’emporte et qu’il meure étouffé.
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