[tarar pònpô] (onomat. FANFA.)
Depuis qu’Adam s’est vu comparé au serpent par une Ève gourmande, il n’a eu de cesse d’inventer des stratagèmes compliqués pour se mettre en avant et prouver combien son appendice n’a rien à envier à celui de Nahash.
Ce comportement ainsi transmis de père en fils depuis la nuit des temps a finalement créé la caste des vaniteux, des crâneurs de la récré qui font rien qu’à faire leur malin auprès des blondinettes à couettes (en leur montrant leur appendice), des ramenards qui aiment à étaler culture, grosse voiture¹ et carte Visa Infinite®.
« Sonnez hautbois résonnez musette » quand le cador en question expose ses exploits, aurait pu s’avérer la formule adéquate mais elle était déjà prise² et finalement bien trop respectueuse. Car c’est avant tout pour le moucher que la langue surannée a voulu tarare pon-pon.
Onomatopée reproduisant d’une part le roulement du tambour (tarare) et d’autre part la sonnerie magistrale des trompettes de la fanfare (pon-pon), tarare pon-pon est opposée à tout plastronneur égrenant ses mérites.
En soulignant subtilement que le phraseur mériterait l’accompagnement musical qui sied à son rang, tarare pon-pon se fait impertinente. Le poseur trop occupé ne relèvera pas l’affront même en cas de doublé fredonné³ : tarare pon-pon tarare pon-pon. Mieux encore, il pourra y entendre un ronronnement admirant (preuve s’il en fallait que trop de tirelipimpon sur le chihuahua affecte les capacités auditives, mais ceci est une autre histoire).
Tarare pon-pon pourra le cas échéant être utilisé comme surnom du crâneur de récré (cf. ci-dessus) ou comme adjectif qualificatif : on dira aussi bien « c’est tarare pon-pon qui est rebiffé comme la poule à Gros-Jean » que « mais quel tarare pon-pon celui-ci ! », ce qui garantira un usage fréquent à tarare pon-pon, les occasions ne manquant pas par ailleurs.
La petite musique de tarare pon-pon se fera ainsi entendre pendant toutes les années surannés, y compris en dehors de la cour de l’école lorsque les concernés finiront par grandir et devront sophistiquer leur légende (on aura bien compris, la maturité aidant, que leur père n’est pas vraiment pilote de voiture de course et qu’ils ne sont jamais réellement partis en vacances avec le président de la République, mais peu importe, ils trouveront de nouveaux enjolivements à leur chimère personnelle, continuant au passage à accaparer la blondinette décidément bien naïve).
La disparition des fanfares et harmonies de village à qui tarare pon-pon devait toute sa construction, entraînera évidemment celle de l’expression.
Sans tambours défilant rampataplan, et sans trompettes criardes perçant les tympans pon-poooon, le moderne ne peut comprendre le sens de tarare pon-pon.
C’est donc désormais sans gêne qu’il se vante d’être plus gros, plus long, plus fort que le serpent de l’Eden.