[i alé dastiko] (loc. agit. PÊCH.)
Le pêcheur pourra témoigner de la vigueur de l’appât. Il est de ceux qui savent le combat résolu de la larve pour ne pas finir gobée par la truite, empalée sur un crochet de métal.
C’est donc sans nul doute au paisible taquineur de goujon que l’on doit l’expression y aller d’asticot pour faire comprendre un combat acharné.
Sans autres moyens que ses contorsions frénétiques puisqu’il est encore engoncé dans cette enveloppe blanchâtre qui le prépare à devenir mouche, le bouffeur de charogne se défend comme un beau diable conscient du destin qui l’attend au bout de l’hameçon.
Et c’est non ! Il ne se dandinera pas entre deux eaux pour le plaisir éphémère d’un poisson que sa gourmandise perdra vite puisque lui aussi finira cuisiné. Alors l’asticot y va d’asticot sans savoir que c’est pour la langue suranné et pour sa postérité qu’il ondoie, qu’il frétille, mutin.
Un dimanche paisible, au bord d’une rivière, naquit ainsi y aller d’asticot.
Il ne fallut certainement que quelques tournées au Balto pour que se partage l’expression tant l’image est patente. Le conte d’une carpe attrapée, la légende du brochet du lac en renfort et c’en était parti pour qu’y aller d’asticot devienne la seule locution capable de décrire le baroud du plus faible.
Le triomphe du trémoussement de diptère fut total
En deux temps trois mouvements y aller d’asticot pouvait donner dans le propre ou dans le figuré, comme il plaisait à son utilisateur.
Y allait d’asticot aussi bien des haleurs que des Peaux-Rouges criards avaient pris pour cibles, les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs, que des danseurs de Saint Guy touchés par la maladie. Un caprice enfantin pour refuser la séance du cinéma des draps blancs (une bonne bataille d’oreiller s’avérant plus plaisante) et y aller d’asticot nous disait le chaos. Toute agitation, le moindre dandinement interdit, et c’était y aller d’asticot.
Le triomphe du trémoussement de diptère fut total. À tel point qu’il attira l’attention des marchands de quiétude.
Considérant qu’y aller d’asticot pouvait s’arranger grâce à la pharmacopée, ils en firent un marché où ne pouvait évidemment continuer à se pavaner cette bande d’ondulés justifiant l’expression.
Un procès lui fut fait.
Et à l’exil en surannéité elle fut sans appel condamnée. Y aller d’asticot plia donc les gaules.